1. Les programmes de drones : la nécessité d’acquisitions complémentaires en l’attente de décisions sur de futurs programmes
La France a pris en matière de drones d’observation un important retard que votre commission a régulièrement souligné.
La loi de programmation militaire 2003-2008 prévoyait l’entrée en service du système intérimaire de drone MALE (SIDM) en 2003 et la livraison des 12 drones Euromale, réalisés en coopération européenne, à compter de 2009.
En fin de compte, le système intérimaire constitué du drone Harfang n’est entré en service que fin 2008-début 2009. Quant au programme Euromale, il n’a jamais vu le jour et a été réorienté en Advanced UAV. L’étude de levée de risque financée par l’Allemagne, l’Espagne et la France, pour un montant total de 57,7 millions d’euros, n’a semble-t-il pas été pleinement concluante.
Le 4ème drone SIDM Harfang commandé en complément des trois drones déployés en Afghanistan est en phase d’essais de réception à Cognac. Depuis mars 2010, les drones Harfang intègrent un dispositif de transmission vidéo au profit des troupes au sol (Rover).
A court terme, le besoin porte sur le maintien d’une capacité MALE au profit des forces. Comme la indiqué le 9 novembre dernier devant la commission le chef d’état-major de l’armée de l’air, « il faut être conscient des limites du système intérimaire, dont les obsolescences, d’ores et déjà visibles, doivent nous conduire à prendre des décisions cette année, si nous voulons pérenniser cette capacité précieuse, incontournable aujourd’hui en termes de renseignement et d’anticipation ». En effet, si rien n’est fait, le risque de rupture capacitaire deviendrait majeur à une date que l’on ne peut établir avec précision, mais que l’on situe généralement autour de 2013.
A plus long terme, c’est-à-dire à l’horizon 2020, une solution pérenne fondée sur un programme en coopération européenne est souhaitable. Vos rapporteurs se félicitent à cet égard de la décision de la France et du Royaume-Uni de lancer en 2011 une évaluation en commun, en vue de disposer aux alentours de 2020 d’un système de drones de haute capacité.
En l’attente de cette solution pérenne, une décision doit être prise pour éviter la rupture capacitaire d’ici 2020. Deux solutions sont à l’étude : la prolongation du Harfang et l’achat sur étagères du Predator B américain, le Reaper.
D’après les indications dont disposent vos rapporteurs, les performances actuelles du Harfang et du Reaper ne sont pas comparables. Plus puissant, plus rapide, volant à plus haute altitude, le Reaper possède 36 heures d’autonomie contre 24 pour le Harfang. Ses capteurs optiques permettent d’identifier une activité suspecte, alors que ceux du Harfang, de conception plus ancienne, se limitent à la détection. Pour des raisons analogues, le potentiel d’évolution du calculateur du Harfang est plus limité que celui du Reaper, par exemple si l’on souhaitait coupler capteurs optroniques et électromagnétiques. Enfin, l’effet de série bénéficie au Reaper, produit à 200 exemplaires, son coût à l’heure de vol étant bien inférieur à celui du Harfang.
Performances comparées du Harfang et du Reaper
Harfang | Reaper | |
Propulsion | La motorisation du drone lui permet d’atteindre une altitude de 6 km et une vitesse maximale de 180 km/h. L’autonomie de vol est de 24 heures. | Le moteur à turbo-propulseur permet d’atteindre une altitude de 15 km et une vitesse maximale de 470 km/h. L’autonomie de vol est de 36 heures. |
Capteurs | Le capteur optique du drone a été conçu il y a plus de dix ans Il offre une capacité de détection des activités suspectes. Le capteur radar n’offre qu’une capacité tout temps limitée. | Le capteur optique a bénéficié des dernières évolutions et offre une capacité d’identification. Les images électro-optiques et infrarouge peuvent être fusionnées. Le capteur radar est issu d’une technologie récente et offre une résolution satisfaisante. |
Capacité d’évolution | De conception ancienne, le calculateur peut difficilement intégrer de nouvelles fonctions. Il existe un risque d’obsolescence sur de nombreux composants. | L’évolution du calculateur est en cours de conception, avec la mise en service d’une version nouvelle en 2012. |
Coût de possession | Système intérimaire, il n’a été produit qu’à 4 exemplaires. Le coût à l’heure de vol est supérieur à 10 000 €, ce qui contraint à limiter l’activité. | Produit à plus de 200 exemplaires, le coût à l’heure de vol est de l’ordre de 8 000 €. |
En ce qui concerne l’autonomie stratégique, les Italiens ne paraissent pas limités en quoi que ce soit par le fait d’être équipés en drones américains.
Des éléments complémentaires sur la possibilité de prolonger le Harfang sont en cours d’examen. Il s’agit de savoir si cette solution peut être mise en oeuvre dans des conditions financières, des délais et avec des performances soutenant la comparaison avec un achat sur étagères de Reaper. La question sera soumise au nouveau ministre de la défense.
Aux yeux de vos rapporteurs, il est indispensable de maintenir et renforcer rapidement l’équipement des forces sans obérer les ressources financières permettant de réaliser à l’horizon 2020 en coopération européenne une capacité pérenne performante.
Les dotations prévues en 2011 au titre des activités du SIDM et du maintien de la capacité MALE s’élèvent à 72,6 millions d’euros en autorisations d’engagement et 19,5 millions d’euros en crédits de paiement.
S’agissant des drones tactiques, la dotation de l’armée de terre en SDTI (système de drones tactiques intérimaires), qui comportait initialement 18 drones, a été complétée par l’achat de 3 drones supplémentaires de nouvelle génération et la reprise de 6 drones Sperwer d’occasion de l’armée canadienne. Des acquisitions complémentaires sont en cours d’étude pour compenser l’attrition en Opex. Les échéances d’un futur programme de drones tactiques (avec une version terrestre, SDT, et une version marine, SDAM) ont été décalées d’un an et se situent à l’horizon 2017.
Les dotations prévues en 2011 au titre des activités du SDTI et du maintien de la capacité drone tactique s’élèvent à 92 millions d’euros en autorisations d’engagement et 9,8 millions d’euros en crédits de paiement.
L’armée de terre dispose de 60 petits drones DRAC et 50 autres doivent être commandés fin 2010.
Enfin, pour répondre aux besoins spécifiques des forces spéciales, l’acquisition d’une capacité complémentaire de plusieurs systèmes de mini-drones Skylark, développés par la société israélienne Elbit, a été opérée en janvier 2010.
2. Les autres programmes dans le domaine du renseignement et des communications
L’année 2011 verra la livraison de 6 nouvelles nacelles de reconnaissance Reco NG (recueil d’images à haute altitude et transmission en temps réel) pour le Rafale. Sur un total de 20 nacelles prévues, 12 devraient avoir été livrées fin 2011, les 8 dernières étant attendues au cours de 2012. Ce système apportera des améliorations notables par rapport aux capacités actuelles des Mirage F1 CR. Il fonctionnera de jour comme de nuit, à grande distance ou à basse altitude et très grande vitesse. Les images pourront être transmises en temps réel ou en temps différé. Les dotations prévues pour 2011 s’élèvent à 2 millions d’euros en autorisations d’engagement et à 30 millions d’euros en crédits de paiement.
En matière de renseignement d’origine électromagnétique (ROEM), la rénovation des deux Transall C160 Gabriel est en cours. La rénovation portera à la fois sur la mise aux normes de l’aviation civile et sur les capacités « Elint » (Electronic intelligence). Un premier appareil a déjà bénéficié de la rénovation de l’avionique. Le premier appareil entièrement rénové devrait être disponible en octobre 2011 et le second en 2012.
La capacité de renseignement électromagnétique aéroportée repose également sur les baies Pelican embarquées sur les ATL 2 de la marine et sur le pod Astac, embarqué sur les Mirage F1CR de l’armée de l’air. Il était prévu que le pod Astac soit transféré sur Mirage 2000D au retrait des Mirage F1CR, mais cette opération est remise en cause par la suspension du programme de rénovation des Mirage 2000D.
Outre le programme spatial Ceres et la rénovation des C160 Gabriel, les opérations intéressant le renseignement électromagnétique sont regroupées, dans le projet annuel de performances, en deux ensembles distincts selon qu’elles relèvent du niveau stratégique ou du niveau tactique.
Les opérations de ROEM stratégique ont pour objectif de moderniser les systèmes de commandement et d’exploitation, la capacité de localisation en gamme HF en réutilisant les sites d’implantation existant et la capacité d’interception en H/V/UHF pour l’ensemble des armées et la DRM. A ce titre, les autorisations d’engagement s’élèvent à 123,7 millions d’euros et les crédits de paiement à 15,3 millions d’euros pour 2011.
Les opérations de ROEM tactique visent quant à elle à réaliser les stations de guerre électronique Catiz, destinées à être intégrées sur les VAB et commandées cette fin d’année 2010, ainsi que d’autres charges utiles de guerre électronique à intégrer sur les différents porteurs des armées.
S’agissant des avions de détection, la rénovation des 4 avions Awacs a été lancée. L’opération de rénovation des communications s’étalera de 2010 à 2012. Par ailleurs, la commande de la mise à niveau des 3 avions de guet Hawkeye de la marine est prévue en 2011.
En matière de communications, l’équipement des forces terrestres en nouveaux postes de radio à haut débit doit s’achever en 2010 avec la livraison des derniers postes « PR4G-VS4-IP », portant à 7 051 le nombre total de matériels. Le programme « PR4G-VS4-IP » est destiné à multiplier par quatre les débits, par rapport aux postes de radio de quatrième génération (PR4G), afin notamment de permettre la transmission simultanée de la voix et des données et de pouvoir renseigner en temps réel les feux sol-air.
Enfin, 380 stations radio tactiques HF Melchior ont été livrées en 2009 sur une commande de 675 stations. Les 295 autres sont attendues d’ici mars 2011. Le nombre total de stations prévu est de 1 100. Une seconde tranche de 425 stations, en version 2, est en cours de définition, 66 stations devant être commandées en 2011. Portables à dos d’homme ou embarquées sur des véhicules tactiques, ces stations, destinées notamment aux forces spéciales, doivent permettre la diffusion des renseignements recueillis et la transmission des ordres de bout en bout, en garantissant l’interopérabilité avec les autres réseaux des armées et ceux des alliés, dans des modes de fonctionnement discrets, antibrouillés et sécurisés.
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