L’action « recherche et exploitation du renseignement intéressant la sécurité de la France » regroupe les activités de la direction générale de la sécurité extérieure (DGSE), comptabilisées dans la sous-action « renseignement extérieur » et de la direction de la protection et de la sécurité de la défense (DPSD), figurant pour leur part dans la sous-action « renseignement de sécurité de défense ».
Les crédits de la direction du renseignement militaire (DRM) relèvent en revanche du programme 178 « préparation et emploi des forces », du fait de la vocation opérationnelle du renseignement d’intérêt militaire, notamment sur les théâtres d’opérations extérieurs.
ÉVOLUTION DE L’ACTION « RENSEIGNEMENT DE SÉCURITÉ »
(en millions d’euros)
Autorisations d’engagement | Crédits de paiement | |||||
2010 | 2011 | % | 2010 | 2011 | % | |
DGSE DPSD | 476,5 96,6 | 543,5 94,0 | + 14,1 - 2,7 | 527,4 96,6 | 559,0 93,1 | + 6,0 - 3,6 |
Total | 573,1 | 637,5 | + 11,2 | 624,0 | 652,0 | + 4,5 |
dont personnel fonctionnement investissement | 393,1 49,9 130,1 | 426,2 69,0 142,3 | + 8,4 + 38,1 + 9,4 | 393,1 49,9 181,0 | 426,2 68,2 157,6 | + 8,4 + 36,7 - 12,9 |
La forte progression des dépenses de personnel prévue en 2011 traduit la poursuite du plan de recrutement de la DGSE et la part croissante des personnels de catégorie A ou officiers dans les deux services.
L’évolution contrastée des dotations de fonctionnement et d’investissement intègre le transfert d’un certain nombre de dépenses de la DGSE du titre 5 vers le titre 3. Si l’on neutralise cette modification de périmètre, on constate une poursuite de l’effort d’investissement pour les programmes d’équipement techniques des services.
1. La direction générale de la sécurité extérieure (DGSE)
Le budget de la DGSE s’élèvera en 2011 à 543,5 millions d’euros d’autorisations d’engagement (+ 14,1 %) et 559 millions d’euros de crédits de paiement (+ 6 %).
A ces moyens s’ajoutent des crédits provenant des fonds spéciaux inscrits dans la mission « direction de l’action du gouvernement ». Selon les documents budgétaires, les crédits sur fonds spéciaux destinés au financement d’actions liées à la sécurité extérieure et intérieure de l’Etat s’élèvent globalement à 53,9 millions d’euros pour 2011, soit un montant analogue à celui de la loi de finances initiale pour 2010. Toutefois, le rapport annuel de performance indique qu’en 2009, les dotations initiales ont été abondées en cours d’année, les crédits sur fonds spéciaux effectivement consommés ayant atteint 67,5 millions d’euros. La DGSE est le principal service destinataire des fonds spéciaux.
? Les effectifs de la DGSE
Les dépenses de personnel de la DGSE s’élèveront en 2011 à 344,6 millions d’euros, soit 35,8 millions d’euros de plus qu’en 2010.
Cette forte progression des crédits de masse salariale (+ 11,6 %) traduit à la fois l’augmentation des effectifs, concentrée sur des personnels qualifiés, les améliorations statutaires et l’inscription d’une dotation destinée, selon le projet annuel de performances, à « revaloriser l’indemnité de résidence à l’étranger (IRE) et améliorer sa budgétisation à la DGSE ».
Ces dernières années, les crédits du titre 2 inscrits en loi de finances initiale ne couvraient pas pleinement les besoins, si bien que des financements complémentaires étaient nécessaires en cours d’année. Le projet de budget pour 2011 devrait mettre fin à cette distorsion. Lors de son audition devant la commission le 3 novembre dernier, le responsable du programme 144, M. Michel Miraillet, a indiqué que le budget prévisionnel accordé à la DGSE permettrait « de résoudre diverses difficultés rencontrées au cours de la gestion 2010, comme le paiement des dépenses d’indemnités de résidence à l’étranger (IRE) ou le financement de diverses mesures catégorielles au profit des corps d’agents de catégorie C du service ».
Le plafond d’emplois autorisé pour 2011 est fixé à 4 759 emplois équivalents temps plein, contre 4 620 en 2010. Cette progression brute de 139 emplois équivalents temps plein résulte de la création de 158 emplois dans le cadre du renforcement de la fonction « connaissance et anticipation », compensée par des mesures d’économies ou de transfert représentant 19 équivalents temps plein.
Le projet de loi de finances suit rigoureusement le cadencement des créations d’emplois prévues par le Livre blanc.
Cadencement des créations d’emplois temps plein travaillés à la DGSE
2009 | 2010 | 2011 | 2012 | 2013 | 2014 | 2015 |
70 | 145 | 158 | 130 | 95 | 70 | 22 |
Source : projet annuel de performances pour 2011
Il faut rappeler que l’on distingue le nombre de personnes supplémentaires recrutées dans l’année et leur contre-valeur en création d’emplois. Par convention, on considère que les recrutements ont lieu en moyenne à mi-année, la moitié d’entre eux se traduisant en création d’emplois sur l’année. L’échelonnement des recrutements est le suivant : 140 en 2009, 150 en 2010, 165 en 2011, 95 en 2012, 95 en 2013 et 45 en 2014. Les 150 personnes recrutées en 2010 correspondent à 75 emplois crées sur 2010 et 75 emplois créés sur 2011. Les 165 recrutements prévus en 2011 seront comptabilisés pour 83 créations d’emplois en 2011 (soit un total de 158 emplois supplémentaires avec l’extension en année pleine des créations de 2010) et 82 en 2012.
La DGSE devrait avoir effectué fin 2011 les deux-tiers (455 sur 690) des recrutements supplémentaires prévus sur la période 2009-2014. Avec 165 recrutements prévus contre 140 en 2009 et 150 en 2010, l’année 2011 correspondra à un « pic » en la matière. Jusqu’ici, les emplois ouverts ont été pourvus sans difficulté.
Ce résultat est d’autant plus satisfaisant que ces recrutements porteront essentiellement sur des agents de catégorie A ou équivalents. Ils s’accompagnent d’un redéploiement interne au profit de postes d’ingénieurs et de techniciens supérieurs.
Il faut rappeler qu’à périmètre comparable, les services britanniques comptent un effectif pratiquement deux fois supérieur à celui de la DGSE. Quant aux services allemands, leurs effectifs sont plus importants que ceux de la DGSE, sans nécessairement accomplir une gamme aussi large de missions. L’effort de rattrapage visant à renforcer les effectifs de la DGSE était d’autant plus indispensable que les enjeux liés au renseignement extérieur sont de plus en plus prégnants.
Au-delà de l’augmentation des effectifs en spécialistes techniques et analystes, la DGSE s’efforce d’améliorer la situation statutaire de ses personnels et l’attractivité des carrières.
Le personnel civil de la DGSE ne relève pas du statut général de la fonction publique d’Etat. Des mesures de transposition spécifiques sont donc nécessaires pour leur appliquer les évolutions intervenues dans la fonction publique. C’est ce qui a été fait en 2009 avec la fusion de certains corps de catégorie B et la refonte en cours des carrières des corps de catégorie C, dont le nombre sera réduit à trois. S’agissant des corps de catégorie A, les décrets statutaires des délégués et inspecteurs ont été signés en 2009. Une nouvelle étape devait être franchie avec plusieurs mesures d’adaptation des carrières de l’encadrement supérieur, notamment un rééchelonnement indiciaire, en vue de créer un corps d’administrateurs de la DGSE calqué sur les grilles indiciaires de la fonction publique d’Etat.
Lors de son intervention le 20 septembre dernier devant la première promotion de l’académie du renseignement, le Premier ministre a indiqué que la DGSE allait « parvenir à concilier des contraintes très particulières qui continueront à s’appliquer à elle, tout en s’inscrivant, autant qu’il est possible, dans le cadre général des règles de la fonction publique ». Il a notamment précisé que le statut de l’encadrement supérieur de la DGSE faisait l’objet, après près de deux ans de travail, d’une réforme importante dont le détail venait d’être arrêté et dont « l’élément le plus visible est le recrutement d’une partie des nouveaux administrateurs de la DGSE directement à la sortie de l’ENA ». Il a également estimé qu’au-delà de la seule DGSE, cette mesure était un signal de la revalorisation du renseignement dans notre société.
? Les moyens de fonctionnement et d’investissement de la DGSE
La répartition entre crédits de fonctionnement et crédits d’investissement a été modifiée, certaines dépenses de maintien en condition opérationnelle des matériels et d’entretien des infrastructures ayant été transférées du titre 5 vers le titre 3.
Cette variation de périmètre explique pour une large part l’augmentation des crédits de fonctionnement qui passent de 41,9 millions d’euros en 2010 à 61,1 millions d’euros en 2011.
Comme l’ensemble des services du ministère de la défense, la DGSE est soumise à des économies de fonctionnement. Celles-ci portent notamment sur le fonctionnement courant et certains achats désormais effectués dans le cadre de marchés mutualisés avec d’autres entités. En sens inverse, la DGSE bénéficie de dotations supplémentaires pour faire face à l’accroissement mécanique des dépenses induit par l’augmentation des effectifs (coûts de recrutement, de formation, d’entretien des locaux supplémentaires) et aux coûts d’approvisionnement en énergie liés à la mise en service de nouvelles salles informatiques.
Les crédits d’investissement s’établissent pour 2011 à 137,8 millions d’euros d’autorisations d’engagement (+ 9,5 %) et 153,3 millions d’euros de crédits de paiement (- 13 %).
Ces dotations visent d’une part à permettre l’acquisition de matériels opérationnels dédiés au traitement et à l’exploitation du renseignement obtenu, ainsi qu’au soutien, au support et à la logistique des opérations et, d’autre part, à la construction, la modernisation et l’adaptation des locaux abritant les matériels techniques de recueil et de traitement de l’information. Des crédits interministériels d’un montant de 54,5 millions d’euros viendront abonder, en cours de gestion, ces opérations d’investissement.
Il faut noter que l’augmentation des effectifs (près de 700 agents supplémentaires en 6 ans) nécessite inévitablement l’aménagement ou la création d’infrastructures.
Les dotations prévues pour 2011 permettent de poursuivre le renforcement des moyens techniques de recueil du renseignement prévu par la loi de programmation militaire. Il s’agit ici d’adapter les outils aux nouveaux modes de communication ainsi que d’accentuer les capacités d’interception et de traitement de l’information.
Cet effort s’effectue dans la logique de mutualisation des moyens entre services retenue depuis plusieurs années. Ainsi, la DGSE est spécialisée sur l’interception des communications et la cryptologie, au bénéfice de l’ensemble de la communauté du renseignement. La direction du renseignement militaire (DRM) met en oeuvre quant à elle les satellites d’observation et les moyens d’écoute des signaux radar. Environ 80 % du budget annuel d’investissement de la direction technique de la DGSE financent des projets intéressant également d’autres organismes.
Globalement, votre rapporteur se félicite de constater que les engagements pris dans le Livre blanc pour renforcer les moyens de la DGSE, tant humains que techniques, sont honorés, en dépit de la révision des objectifs de la loi de programmation dans d’autres domaines.
Une nouvelle fois, il insiste pour souligner que beaucoup de retard avait été pris par le passé et que cet effort était indispensable pour répondre aux défis, très nombreux, auxquels le service est confronté. Le suivi des évolutions technologiques et la prise en compte des menaces qui pèsent sur notre pays et nos ressortissants exigeront le maintien de cet effort.
2. La direction de la protection et de la sécurité de la défense (DPSD)
La direction de la protection et de la sécurité de la défense (DPSD) est le service de renseignement dont dispose le ministre de la défense pour assumer ses responsabilités en matière de sécurité du personnel, des informations, des matériels et des installations sensibles. Son domaine de compétence couvre les forces armées, la délégation générale pour l’armement, les services de la défense et les sociétés industrielles liées à la défense au titre d’un contrat.
Agissant dans un cadre exclusivement préventif, la DPSD conjugue ainsi deux métiers distincts : la contre-ingérence et la protection. Une part importante de l’activité de la DPSD est dédiée à la lutte anti-terroriste, au contre-espionnage, à la protection du personnel, ainsi qu’à la sécurité des installations et des systèmes d’information et de communications. Elle agit également au profit de l’industrie de défense, tout en s’inscrivant dans la démarche nationale d’intelligence économique, en s’attachant à prévenir les menaces pouvant atteindre le patrimoine industriel français en participant à la surveillance du commerce des armements.
Conformément aux directives fixées par le ministre de la défense en juin 2010, les priorités d’action qui lui sont assignées portent sur la lutte contre l’ingérence et la protection du patrimoine industriel et scientifique de la défense. A ce titre, elle s’investit de manière croissante dans la sécurité des systèmes d’information. La DPSD est également chargée, dans le domaine de la protection du secret, de mettre en place un dispositif innovant de sensibilisation aux compromissions, en diffusant auprès des personnels concernés des recommandations concrètes directement inspirées des incidents constatés.
Les moyens alloués à la DPSD en 2011 s’élèveront à 93,1 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, soit une diminution de 3,6 % essentiellement imputable aux réductions d’effectifs.
Le plafond d’emploi retenu pour 2011 se monte à 1 224 équivalents temps plein (975 militaires et 249 civils), en retrait par rapport à 2009 (1 260). Cette réduction concernera essentiellement les effectifs sous-officiers, qui représentent plus de la moitié des personnels du service, et les personnels de catégorie C ainsi que les ouvriers d’Etat. En revanche, la DPSD poursuit le nécessaire renforcement de son encadrement civil. Les effectifs de catégorie A qui étaient passés de 15 emplois en 2009 à 23 emplois en 2010 seront portés à 33 emplois en 2011. Les effectifs officiers passeront de 229 à 228 emplois.
Les fonctions « protection » et « contre-ingérence » représentent 79 % de l’effectif, le restant (21 %) relevant de la fonction « soutien ».
Les crédits de personnel de la DPSD passeront de 84,2 millions d’euros en 2010 à 81,6 millions d’euros en 2011.
Globalement, la DPSD est engagée dans une diminution des effectifs qui sera supérieure à 15 % sur six ans. Cette réduction est en partie permise par l’optimisation des soutiens en cours pour l’ensemble du ministère de la défense (création du service parisien de soutien de l’administration centrale et des groupements de soutien des bases de défense). Elle repose surtout sur la dématérialisation des procédures d’habilitation, qui représentent une charge très consommatrice en personnels pour les saisies et l’archivage et pourrait faire économiser de l’ordre de 150 emplois.
Le projet SOPHIA (synergie pour l’optimisation des procédures d’habilitation de l’industrie et des administrations) permettra la numérisation des procédures, mais également leur centralisation au siège de la DPSD, alors qu’elles sont aussi traitées, actuellement, à l’échelon régional.
En parallèle à ces réductions d’effectifs administratifs, la DPSD a obtenu un renforcement du nombre de personnels qualifiés, qu’il s’agisse d’officiers brevetés ou de personnels civils de catégorie A. L’objectif poursuivi est double : recruter des experts techniques pour les missions liées à la sécurité des systèmes d’information, qui sont appelées à prendre de l’ampleur ; disposer, en quantité et en qualité, des analystes chargés d’exploiter le renseignement recueilli et de le valoriser au profit de l’ensemble de la communauté du renseignement.
Hors titre 2, les dotations de la DPSD se limitent à 12,4 millions d’euros en autorisations d’engagement, montant analogue à celui de 2010, et à 11,5 millions d’euros en crédits de paiement, soit 7 % de moins qu’en 2010.
Outre un transfert vers le programme 212 pour un marché de numérisation des archives, cette baisse des dotations résulte d’économies sur le fonctionnement courant, notamment en matière de télécommunications, dont certaines ont déjà été mises en oeuvre cette année, permettant d’ajuster les crédits aux besoins réels.
Le dispositif de la DPSD en métropole s’est resserré (42 implantations en 2010 contre 64 en 2001). Une antenne a été créée à Kourou, ainsi qu’à Abou Dhabi à la suite de l’ouverture de la base française.
Votre rapporteur constate que la DPSD est engagée dans la voie de la modernisation, grâce à l’allègement des tâches administratives, et qu’un effort significatif est réalisé pour rehausser la qualification de ses personnels, en adéquation avec ses missions en matière de sécurité des systèmes d’information et avec sa pleine participation à la communauté du renseignement.
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